Dans une interview accordée il y a plus de vingt-cinq ans à un journaliste français, l'ex-PDG de VW, Carl Hahn, avait qualifié la BX de "meilleure voiture de monde" sans que l'on sache vraiment s'il usait ou non d'ironie.
Quoi qu’on en (mé)dise, question sécurité active, légèreté, équilibre dynamique et confort de roulement, les ingénieurs de Citroën ont longtemps forcé le respect de leur profession. A ces géotrouvetous, nous devons notamment l’automobile à finir de mettre au point soi-même ou l’interrupteur de frein qui vous envoie déguster le pare-brise à la moindre pression. Au-delà de ces avancées déterminantes, le seul petit problème vient de l’obsession du crétin moyen pour la performance, une idée fixe qui, il n’y a pas si longtemps encore, suffisait à oublier conception d’avant-guerre et confort fascisant du moment que votre boîte à chaussure grillait celle du voisin au feu rouge. La publicité eut beau rappeler que l’un des auteurs de la BX, Marcello Gandini, avait également commis la Lamborghini Countach, la Citroën n’en restait pas moins autant évocatrice de sportivité qu’une bonne paire de charentaises quand sa poupe appelait davantage le crochet d’attelage et les bavettes de roue qu’un aileron auto-rétractable.
Très inspirée des concept-cars Bertone Ascot, Sibilo et Toundra (sur base Jaguar XJS, Lancia Stratos et… Volvo 343) à une époque où le style cunéiforme présageait d’un futur d’équerre, la BX aura sans doute mobilisé davantage d’imagination et de talents que n’importe quelle moissonneuse batteuse américaine élevée au rang de mythe sous prétexte de V8 bêtement gonflé. On a malheureusement du mal à retenir autre chose de ce chef d’œuvre que les arêtes vives de son profil de fromage de chèvre, les boursouflures pseudo-aérodynamiques des versions Sport et 16 Soupapes et la vitre de custode en plastoc qui jaunissait au soleil aussi rapidement que la voiture dépréciait. Souvenons-nous aussi du charabia technico-débile qui s’étalait en caractères spartiates sur le volet arrière - BX 14 RE, BX 16 TRS, BX TRD TURBO EVASION, etc. Encore que sur la fin, les Goncourt du marketing signèrent la carrosserie de formules plus littéraires – « Image », « Millésime », « Ourane » - autant de fulgurances lyriques qui ont sans doute grandement contribué à asseoir la crédibilité d'un modèle déjà symptomatique d'une sénilité avancée.
Malgré ce bilan contrasté, je dois ici confesser qu’aucune Honda S2000, Lotus Exige ou Porsche Boxter n’attise autant ma libido qu’une BX. Je ne plaisante pas le moins du monde, la Citroën exhale un érotisme insoutenable, et je devine à vos mines déconfites que vous n’avez jamais fait l’amour dans une BX. D’ailleurs, plutôt que jouer les contorsionnistes dans le dernier tape-cul en vogue, vous devriez expérimenter l’amour façon Citroën, confort pullman et nuit quatre étoiles pour une bouchée de pain, discrétion comprise. Pas facile d’oser, au début, mais une fois que vous y aurez pris goût, l’étreinte de ces sièges copieusement rembourrés comme des fesses bien pleines, l’empoignade de ce volant enflé comme des seins bien lourds, la moelleuse élasticité d'un touché de route digne d’une jouvencelle en fleur, provoquera en vous l’irrépressible envie de proposer la botte à la première passante. Ne lésinez pas sur la quantité, il y a de la place pour tout un sérail à l’intérieur.
Vous comprendrez dès lors qu’il ne faut plus jeter les BX, en regrettant comme moi qu’aucun fabriquant de literie ne fasse les matelas comme Citroën les voitures.
Si les premières DS -57 à 66- étaient vraiment loukoumisantes de confort, mon ex-DS 23 Pallas de 73 était plus ferme.
La DS avait un essieu plus large à l'avant et l'arrière était plus étroit, comme un buste féminin plus généreux à la taille néanmoins élégamment ceintrée.
Ce que confirmait ses escarpins avec la monte pneumatique XAS asymétrique Michelin, indissociable à l'auto, comme pour encore en améliorer les qualités routières déjà extraordinaires:
185 x 14 à l'avant et 165 x 14 à l'arrière.
La BX "Image"; je la connais par mon frère qui en a possédé une.
L'entretien était encore abordable sur ce modèle 1,6 l carbu fort de 90 ch DIN, car une clarté mécanique inhabituelle à la conception "d'ingénieurs" de Citron se faisait apprécier des bricoleurs du dimanche.
C'est vrai que les sièges en velours noirs au bon maintien latéral étaient agréables, mais le confort hydro-pneumatique était ferme tout de même!
Assis au volant, le combiné d'instruments était éclairé même tous feux éteints, comme pour inciter son conducteur à plus d'attention.
Je n'ai pas les chiffres de la masse de l'auto en tête, mais le rapport poids/puissance était favorable, sans que ce soit pour autant une voiture de sport.
Mon frère étourdi sans doute par les capacités de tenue de route supérieures de son engin à bain d'huile, allumait "grave", le viandard!
Mais gaffe, bonnes gens!
Citron pressé ou pas, un virage pris trop vite, et c'est le tout droit assuré!
L'ambiance "quincaille" du mobilier de bord respirant les basses économies d'échelles de PSA, tapent sur les nerfs à la longue.
D'autant que l'auto en vieillissant avait une fiabilité perfectible.
Mauvaise pioche?
C'est en tout cas franchement dommage!
D'autre part, Citroen qui détient encore l'exclusivité mondiale grâce à des brevets protégeant son fond de commerce hydro-pneumatique, ne peut voir un équipementier fabriquer des pièces sans verser son obole au constructeur.
Cela fait plus de cinquante ans que l'invention est tombée dans le domaine public; n'importe qui pourrait fabriquer des pièces détachées hydropneumatiques sans arrière-pensée judiciaire de quel que procès que ce soit.
Le croyez-vous vraiment?
Réfléchissez un peu!
OK! Je vais vous le dire, c'est bien parce que c'est vous:
L'Armée française utilise une application de la suspension hydro-pneumatique sur l'AMX 8 RC (roues et canon), et, à ce titre, l'invention civile Citroen est protégée du militaire "secret défense"!
Consolez-vous comme Laurent, en en faisant le Dunlopillo le plus confortable du monde, dans les sous bois humides à la faveur de la tombée du jour en cédant à l'appel des hormones!
La buée sera telle que votre coït de pleine lune ne sera troublé que par le claquement sec du conjoncteur-disjoncteur précédé de son roulement de tambour étouffé, comme pour mieux préserver l'ambiance sonore de souffles et de râles de deux corps fondant ensemble de plaisir!
Ou si vous préférez l'intimité de la lune noire, c'est pour bientôt...