Econduire l'Exigeante.
Réflexion faite, la Lotus Exige n’est sans doute pas le meilleur remède au célibat en ce mois de matraquage saint-valentinien où le romantique moyen réalise avec angoisse qu'il n'a plus de présentoir à pipe. Le propos aurait pu sembler hors de proportion si notre première prise en main n’avait ramené l’Exige à sa juste échelle, celle des rases-motte. La lutine est à ce point lilliputienne qu’elle vous dissuadera de vous frotter au moindre monospace compact de peur de vous faire hâcher menu. Pas très engageant pour une future mère pondeuse qui préfèrera le profil plus sécurisant d’une Rolls des sables !
Pauvre petite Lotus ! On ne descend pas dans une Exige. On ne s’y engouffre même pas. On s’y calfeutre comme dans un carton à chapeau. L’accès à bord nécessite d’enjamber préalablement l’énorme longeron. Ensuite, arc-boutez-vous pour passer sous la ligne de toit sans bobo. Si vous n’êtes pas trop épais, vous pourrez espérer vous incruster entre l’envahissante traverse latérale et le tunnel de transmission. Passée cette peu gracieuse acrobatie, essayez d’embarquer à bord la jambe que vous aurez laissée au dehors sans esquinter le tableau de bord avec le pied.
Inutile d'ajouter que si vous projetez de ramener votre ravissante secrétaire au sortir du bureau, veillez à ce qu’elle ne porte pas de jupe trop serrée. A moins qu’elle ne l’enlève, ce que je vous souhaite, c’est la déchirure assurée, pour la jupe bien sûr, mais surtout pour votre idylle.
Enfin, vous voilà installés. Si d’aventure le pédalier vous semble trop décalé vers la droite, sachez qu’il n’y avait pas moyen de faire autrement. Chez Lotus, on vous aura prévenu, le client s’adapte à la voiture et non le contraire. Les omniprésents longerons bruts de fonderie confinent l’habitacle dans une délicieuse intimité ou une nauséeuse promiscuité suivant que votre passagère s’appelle Catherine Zeta-Jones ou Catherine Millet. Dans tous les cas, ne jetez pas votre dévolu sur une taciturne coincée de la conversation, car le peu de distraction offert par l’instrumentation kolkhozienne ne vous occupera guère entre deux épisodiques réflexions sur le temps qu’il fait. Tout au plus pourrez-vous faire divaguer votre imaginaire au-delà de la zone rouge culminant à 8000 tours quand l’écrasante majorité de vos compatriotes diésélisés ne s’aventurent jamais plus au-delà des 5000.
De quoi meubler les silences de votre inhibée poupée, car le passager clandestin que vous avez dans le dos, lui, est plutôt du genre exhibitionniste. Un bref regard jeté derrière vous par la vitre impudique vous rappellera la présence du moteur 1,8l en position centrale arrière. A vous de choisir la votre et soyez rassurés quant aux bruits qui courent, celui de ce teigneux bloc Toyota couvrira largement vos amours transitoires. Alors, lâchez-vous, les verrouillages fermes et précis de la boîte ultra-courte sauront peupler l’inconscient de votre bêcheuse d’allusions phalliques à même d’influencer favorablement son degré d’hydrométrie.
Voilà, vous savez tout. Une fois les clés en main, vous aurez mis un maximum de chances de votre côté. Surtout ne faîtes pas de bourde, sachez éviter les pièges et si tout se passe bien, vous découvrirez la présence d’eau chaude chez la femme en plus d’avoir essayé un aspirateur à pépée comme on n’en fait plus.
(Dédicace au gang distingué où j'ai mes habitudes)