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LE BLOG DE LA JAMAIS CONTENTE.
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12 février 2009

Essentialisme.

c35

L'authentique est l'essence même de mon existence. Alors que seule une vraie Rolex peut donner l’heure juste et que l’on ne saurait faire de vrai carnage sans tir à balle réelle, je me devais de posséder une vraie Porsche afin d’asseoir définitivement ma crédibilité dans la vie, la vraie. Naturellement, à l’heure où tant de cuistres prennent de fausses 911 pour de vraies Porsche, aucune fausse Porsche n’aurait pu me confondre à la notable exception d’une vraie 911 !

Dernière Porsche en porte-à-faux du modernisme  automobile, ma première 911 m’a permis de goûter aux joies des plus pures sorties de route et des véritables points de suture. Avec elle, j’accédais enfin à la quintessence de la Vérité en même temps qu’à la réalité révélée du Porsche Fundamentalists Club. Arrivé aux milieux des justes ne pouvant avoir tort, je convoitais déjà la première poule venue quand mon bolide heurta irrémédiablement les convictions de ma promise. J’étais refroidi par eau, elle m’a refroidi à l’air. Sacrilège impardonnable, entre elle et moi, sa 993 et ma 996, il n’y avait pas plus de compréhension possible qu’entre absolutistes résolus et farouches adversaires de la messe en latin.

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Ayant promptement revendu ma fallacieuse acquisition pour un modèle antérieur forcément plus réel tant il paraît acquis que les Porsche étaient plus vraies au bon vieux temps d’autrefois, je pus à mon tour entretenir le snobisme de la lamentation passéiste. Fin de race ? Fin d’une époque ? Fin du monde ? A l’évidence, ma 993 fournissait matière à toutes les pleurnicheries à la mode. Réhabilité de fait parmi les gentlemen drivers, je pris la tête de la croisade anti-faussaire. Malgré mon abnégation à disserter de l’impossibilité de vivre dignement sans pédalier articulé par le bas quand l’écrasante majorité ne cherche qu’un simple moyen de transport économique et pas trop cher, le pape de la 911, trouvant mon zèle encore trop timide, mit ma Carrera 4 à l’index, condamnant d’office son comportement quasi neutre. Or, le propriétaire d’une vraie Porsche ne saurait ramollir le prestige de ses organes dans un cocon sécuritaire, mou d’allure, avachi sous le poids des restylages successifs. D’objet de culte ultime, mon morceau d’histoire rétrograda au rang de décadente impie. Un sévère camouflet qui me coûta la mise au rebut de l’aréopage.

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Je fis longuement pénitence lorsque j’eus la révélation de la 964. Rappelez les pleureuses et ressortez votre plus beau mouchoir, la der des ders, la pour toujours définitive, l’à jamais terminale, l’irréversiblement irrévocable et suprêmement irremplaçable, c’était elle ! Renforcé dans mon puritanisme, j’allais de concentrations en rassemblements de m’as-tu-vu tout heureux de gaspiller du pétrole et de la gomme aux yeux des promeneurs fauchés du dimanche après-midi. De dérapages clownesques en cascades imbéciles, je démontrais brillamment comment les vraies 911 font les vrais crétins jusqu’au jour où un vieux de la vieille me traita de jeune inculte incapable de faire la différence entre une grosse GT et une Porsche. Trahison ! Aux yeux des gardiens du culte, assistances hydrauliques et injection électronique, ces enfants terribles du progrès impie insultaient irrémédiablement la mémoire des anciens. Ne pouvant supporter que l’on puisse posséder 911 plus véritable que ma Carrera 2, je répudia aussitôt l’infamante.

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Ayant abjurés mes erreurs de jeunesse, je m’approchais au plus près de la vérité révélée au volant d’une type « G ». Promis, juré, craché, aussi incontestable qu’il n’y a pas de salut possible sur cette terre sans jantes Fuchs, ma Carrera 3.2 demeurerait pour toujours et à jamais la dernière des vraies de vraies, l’immaculée, l’immortelle, l’irremplaçable 911. Malheureusement pour mon niveau d’avancement dans le gotha des passéistes, le prestige de mes pare-chocs caoutchoutés n’égalait pas tout à fait la grâce des fines lames chromées alors que l’image sécuritaire rabat-joie des années post-73 surpassait avec grand peine le parfum d’insouciance des swinging sixties. Plus vraiment d’occasion mais pas encore de collection, ma vraie 911 avait en définitive tout faux.

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M’aurait-on menti ? De guerre lasse, ma soif d’absolu m’emmena aux sources même de la légende. Sachant que la carte grise collection légitime jusqu’aux plus notables merdes quand la patine du temps vous arroge la bienveillance aveugle des meutes chagrines, il me fallait une 911 sous alibi « historique », en d’autres termes, techniquement obsolète, spartiate à en mourir, rapide comme une honnête familiale moderne, garante de l’insécurité routière les jours de pluie mais tellement plus crédible, cela va sans dire, qu’une Porsche honteusement moderne. L’immaculée non sans mal dénichée, je trouvai enfin la paix intérieure et m’apprêtais à extraire la quintessence de ma savonnette à la faveur d’un sol gras quand un puriste encore plus pur que tous les autres bouleversa une nouvelle fois ma conception du monde. Fier comme Artaban aux commande de sa 356, le janséniste jeta à ma pouliche le regard condescendant que l’on porte habituellement aux coupés bourgeois. J’avais encore une fois failli dans l’orthodoxie en oubliant que la 911 descendait de la 356, la seule, unique et définitive détentrice de l’esprit originel, cela va de soi.

Déboussolé dans mes certitudes, je découvris quelques temps plus tard que la 356 dérivait en fait de la Volkswagen, le seul vrai jalon de l’histoire d’après les disciples de la bête à bon dieu. Puis, ma quête essentialiste vira carrément au chaos intellectuel dès lors que j’appris d’un cocher demeuré au XIXème siècle que les seules vraies voitures ne pouvaient qu’être hippomobiles, comme au bon vieux temps...

De révélations explosives en bouleversements existentiels, mes troubles obsessionnels ne trouvèrent de remède qu’une fois suffisamment à l’écart de l’évolution humaine. De ma chaumière en torchis d’où je vous écris aujourd’hui au milieu de mes bœufs et gallinacés, je savoure pour la première fois depuis longtemps la satisfaction d’être dans le Vrai, ou plus précisément, dans la fiente et la bouse séchée. Certes, mes sabots garnis de paille ne relèvent pas du même confort que mon ex-paire de Church’s, le culte du Frigidaire ne m’apparaît plus aussi futile comparé aux contraintes de la salaison et je me surprends parfois à rêver de cuvettes Jacob & Delafon, assis sur mon pot de chambre, mais rien de ces subversives pensées ne pourraient ternir mon bonheur fondamentaliste, libéré que je suis de l’insidieuse fourberie du progrès impur.

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Commentaires
O
L'effet "Rücksack" n'est pas le monopole de la marque de Stuttgart-Zuffenhausen; les dieppoises Alpine A 310 et autres A 610 ont su offrir les joies de la glisse aux amateurs des autos de sport de Jean Rédélé.<br /> <br /> <br /> Bien sûr, de bien plus prestigieuses se sont illustrées victorieusement lors de rallyes mythiques tels Monte-Carlo avec de pilotes de grand talent, mais la jeune A 310 mûe au départ par un 1565, puis 1647 cm3 issu de la R 16 devait faire face à une Porsche 911 très mature au milieu des 70's, et ce, toujours grâce à l'humble politique des petits pas chère au Dr Ing. Ferry Porsche.<br /> <br /> <br /> Les puristes ont pourtant accueilli tièdement cette nouvelle A 310 à la ligne aérodynamisme très efficace; jugez-en:<br /> <br /> le simple 1,6 l de 90 ch de la R 16 TX plafonnait à 195 "chrono" dans une A 310 là où une "Seize" TX frôlait les 170 réels!<br /> <br /> <br /> Certes, d'autres mécaniques plus affûtées ont transformé ce Grand Tourisme rapide en hargneuse sportive tailleuse de croupières de Porsche 911, au mouvement de volant pendulaire caractéristique à haute vitesse!<br /> <br /> <br /> Puis vint la greffe d'un mal-aimé V6 PRV dans notre A 310, qui, avec ses 150 ch d'origine et sa légèreté, dépassait allégrement les 225 km/h!<br /> <br /> <br /> Ce qui ne gâchait rien, la Dieppoise avalait 11 l de plombé aux cent à 180 km/h!<br /> <br /> <br /> Tout cela est bien risible aux yeux d'un porschiste ayant choisi sa monture dans les versions pointues, sauf que des préparateurs allemands amoureux de la Dieppoise n'ayant pas fait l'école du rire, ont soigneusement peaufiné les réglages d'un V6 tout aussi courtois et bien élevé en usage civil dans une limousine de l'époque, que méchant et brutal par l'ajout d'un turbo-compresseur, et ce, sans perdre une once de fiabilité!<br /> <br /> <br /> Fin du fin, notre ami V6 PRV gentleman-farmer a le bon goût d'être extrêmement bon marché à entretenir tels que peuvent l'être les non-élitistes gros V8 Yankees culbutés outre Atlantique, sans coûter un oeil à chaque intervention; ce dont Porsche ferait bien de s'inspirer pour l'entretien de ses pur-sangs!<br /> <br /> <br /> Remarque certes mesquine mais ô combien délicieuse au quotidien!
P
Grâce à vous, la 911 a maintenant dépassé le stade du mythe pour atteindre celui de métaphore pure ! En effet, quoi de mieux que la 911 pour illustrer le sempiternel “c'était mieux avant”...<br /> <br /> Un temps intéressé par une 964 Tiptronic (encore un crime de lèse-911) et tenté d'attendre que la cote descende un peu, je me suis aperçu que le temps passant (observation réalisée sur 10 ans) n'avaient strictement aucun effet sur la cote de ce qu'il est convenu d'appeler la première 911 de l'ère moderne (bien que n'étant pas la plus réussie avec ses pare-chocs à la sauce US et l'entretien le plus onéreux de la saga 911).<br /> <br /> La boîte auto sur un tel véhicule eût dû m'assurer une moins-value significative, mais c'était sans compter sur l'argumentaire bien rodé des pourvoyeurs en 911 d'occasion. Autre curiosité, plus le temps passait, moins les exemplaires convoités affichaient de kilomètres au compteur, ce qui au bout d'un certain temps mit un point final à une envie, il est vrai habilement entretenue par une presse spécialisée et un bouche-à-oreille d'initiés...<br /> <br /> Mais finalement, n'est-ce pas là l'une des nombreuses formes de snobisme particulièrement bien relayée (il en est d'autres, et pour toutes les nationalités d'automobiles), qui au final réalise l'exploit de porter aux nues une auto de sport dont la caractéristique principale est d'avoir une architecture pour le moins... atypique !<br /> <br /> Car il faudra toute la (mauvaise) foi d'un intégriste-911 obédience refroidissement par air pour vous assurer que rien ne vaut un moteur en porte-a-faux arrière pour rouler vite... sans doute en vertu du “théorème du sac à dos” ! (à l'usage des ignorants et des mal polis aurait ajouter Pierre Desproges).
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